KUOM....PAR HASARD
Moi, vous devez commencer à le savoir, ce qui me plait dans la chasse aux épaves, au-delà de la découverte du véhicule, c'est d'essayer, quand c'est possible, de remonter le cours de sa vie, de retracer son histoire.
Ma dernière prise m'a amené à m'interesser à une société de fabrication de meubles de l'Oise nommée KUOM, située à Rantigny, petite bourgade entre Beauvais et Compiègne. Aujourd'hui, par la grâce du net, il suffit de quelques minutes pour tout savoir.
J'ai ainsi découvert que cette entreprise familiale a été un des leaders des meubles Français mais n'a pu résister, au tournant des années 70, à la concurrence des grands groupes et a fermé ses portes en 2013, après 85 ans d'activité. Aujourd'hui, quelques urbexeurs présentent ce qu'il reste du site sur youtube.
Une recherche poussée sur la flotte de véhicules de cette entreprise dévoile un large éventail de la production Française et, dans les années 50 et 60, les Citroën U23 et type H, Renault Galion, Peugeot 404 constituaient le gros de la troupe, rien que de très logique...
En approfondissant ces recherches, on trouve même aujourd'hui encore quelques miniatures en vente sur le net. A l'époque, elles étaient offertes aux enfants des clients...
Mais quel rapport, me direz-vous, entre une entreprise d'ameublement du nord de la France et le maquis Corse ? Pourquoi cette introduction inhabituelle, loin du coeur du sujet, les épaves Corses ? Jean-Jo prendrait-il la grosse tête au point de se lancer à l'assaut des épaves sur le continent ?
Non, rassurez-vous, d'autres s'y emploient, et avec talent...
En fait, ce préambule s'imposait, car, vous l'aurez deviné, j'ai découvert un véhicule de la société KUOM, sur l'île de beauté, blotti contre une Estafette... Mais, de retour chez moi, au fil de mes recherches sur la toile, j'ai noté un détail qui a manqué de me faire tomber de la chaise........
Approchons-nous.... Plus de meubles à l'intérieur, mais un bric-à-brac sans nom, pneus, vélos d'enfant, etc....
La déco latérale est encore visible. Je parviens à lire "KUOM", ce qui, à cet instant, ne me dit rien du tout...
Parvenu à l'avant, je découvre ce à quoi la jante arrière m'avait laissé penser, je suis en présence d'un RENAULT Galion 2.5T R 2168...
La plaque d'immatriculation arbore un 9561 QT 83 peint à la hâte, prouvant que le véhicule a été réimmatriculé dans le Var en 1973...
Sur ce, après quelques autres photos, je rentre à la maison et j'entame mes recherches sur KUOM. Et c'est l'examen attentif de la plaque d'immatriculation qui fait basculer cette trouvaille d'"intéressante" à "exceptionnelle"....et qui m'a incité à repasser voir ce Galion une semaine après pour le mitrailler de clichés....
En effet, en détaillant la plaque, j'ai noté la présence du numéro d'origine encore visible sous le numéro peint et je suis parvenu à déchiffrer 473 GL 60...comme sur le Galion de la photo d'époque ! Plus de doute, je suis en présence d'un seul et même véhicule ! Coïncidence complètement improbable : ce Galion a donc été livré neuf dans le département de l'Oise, a transité par le Var avant d'échouer en Corse !
La boucle est bouclée avec l'examen de la plaque arrière, qui comporte un FJ 20 daté de 1974....
Curieusement, le numéro Varois n'est plus visible à l'arrière, pas plus que le Corse à l'avant....
Si je récapitule, j'en déduis qu'il a vécu dans l'Oise de 1961 à 1973, puis dans le Var durant une petite année 73/74 et direction la Corse en 1974 ! Il est permis de penser que c'est un Corse résidant dans le Var qui l'avait acquis pour le ramener sur l'ïle, ce qu'il fit l'année suivante !
Faisons un rapide état des lieux... Sur la porte, une invitation à demander le catalogue au chauffeur est encore visible...tout comme le numéro de téléphone sur le montant et sur le flanc, si le dessin a disparu, l'adresse 35 route de Mouy à Rantigny n'est pas totalement effacée...
Au-dessus du pare-brise, le nom de la société s'étale encore mais la mention "meubles" sur le caisson a disparu.
Je jette un coup d'oeil à l'intérieur... Une portière d'Acadiane est assise à la place du mort...
Tous les boutons semblent présents... Les vandales sont passés au large.
Au moment de laisser ce témoin d'une époque révolue retrouver sa quiétude, je lui offre une photo de sa jeunesse, lorsqu'il sillonnait les routes du département de l'Oise en lui souhaitant une longue retraite protégé par le maquis sauvage de l'île de beauté.
Jetons un regard à sa voisine, qui lui tient compagnie depuis quelques années sans doute... Elle porte une immatriculation Corse délivrée en 1976...
En matière d'épaves non plus, la valeur n'attend point le nombre des années puisque cette FORD Escort mk3, bien que née en 1983 (soit 9 ans après l'arrivée du Galion en Corse !!!) est déjà bien patinée...
Dernières habitantes des lieux, un couple de PEUGEOT 305. La blanche est immatriculée en 1980 dans le Val-de-Marne, la bleue en 1978 en Corse. C'est avec elles que se termine l'exploration de cet endroit qui gardera longtemps sa part de mystère...