EN FIN DE CARRIERE
Un endroit isolé mais en lisière de la civilisation....Un site à la fois calme et oppressant, une impression de solitude et en même temps la sensation d'être observé....Voilà ce que l'on ressent en cheminant sur ce sentier oublié... Tout commence par une discussion informelle : "- vous qui aimez la rouille, vous devriez faire un tour dans cette ancienne carrière..." Aussitôt dit, aussitôt fait, je m'empare de mon APN et je me lance sur un petit chemin escarpé, qui serpente à flanc de colline. Difficile d'imaginer l'activité qui régnait en ce lieu il y a 30 ans, le petit chemin (qui ne sent pas la noisette... ) était alors une route assez large pour laisser passer les camions, ce dont témoignent quelques plaques de bitume rescapées ça et là...
Arrivé à la barrière, équipée d'un "saltatoghju" en bois, pour permettre aux chasseurs de passer, je suis accueilli par le gardien des lieux ...si, si : regardez bien à gauche...
Je reprends mon ascension, à travers les épineux qui se sont rendus maîtres de la chaussée...Le chemin s'élève brusquement...
Disséminés dans le maquis, quelques fragments de matériels roussis témoignent du passé industriel du site...
L'oeil aux aguets, tous les sens en éveil, je commence à explorer les buissons environnants car, aux dires de mon informateur, le plus beau reste à venir....Me voici dans un virage d'où partent 2 chemins...
"Prendre toujours à gauche" m'avait-on conseillé...L'instinct étant décidément le plus fort , je m'engage à droite et, là...: je tombe sur un Renault AHN bien bronzé....
Et ce représentant de Billancourt n'est pas seul ! A proximité immédiate m'apparaît un joli petit RENAULT 1000 kg à portes "suicides" et aux panneaux latéraux striés : peut-être hébergeait-il un groupe électrogène du temps de l'exploitation du site...
Il profite aujourd'hui d'une retraite bien méritée et, surprise, il a de la compagnie....
Je laisse donc ce Renault se rendormir avec son AZU et je reprends l'ascension du sentier.... Pas âme qui vive aux alentours, exceptés quelques corbeaux en quête de leur pitance quotidienne....crô....crô.....
C'est alors que j'arrive sur une espèce de promontoire dominant le ravin....
Ce laborieux semble avoir été précipité dans le vide est s'est retrouvé complètement disloqué....J'ai grand peine à l’identifier...Peut être un DODGE S7ma 51...
Cependant, à ses côtés....
Cette pauvre Dauphine n'a pas connu un sort plus enviable : elle dort couchée sur le flanc sur un torrent de pierres, son capot gisant à ses côtés... Mon rythme cardiaque s'accélère brusquement, mais je décide de continuer la grimpette : bientôt la fin de la route et quelque chose me dit que je ne suis pas au bout de mes surprises...
Je me retrouve ainsi dans une sorte de cathédrale de granit, au milieu d'un déchainement de pierres et de rochers entrelacés. Le silence rappelle également un lieu de culte et incite presque au recueillement...
Reste à trouver l'autel .....quand soudain, en levant les yeux , juste au dessus de moi....
....un terre-plein creusé dans la roche, la route y menant s'est effondrée depuis belle lurette....De ce fait, plus personne ne le dérangera désormais : il est là, bien tranquille au milieu de la végétation qui bientôt l'aura recouvert...Il m'apparaît dans toute sa déchéance, dégageant un je-ne-sais-quoi d'inquiétant et en même temps quelque chose de sympathique...
Un Citroën U55 ! Me cramponnant à un branchage, je décide de me hisser jusqu'à lui....
Le clin d’œil qu'il m'adresse est de nature à me rassurer : il n'a nulle intention belliqueuse à mon égard...
Au prix de contorsions éprouvantes, je parviens à me hisser au poste de pilotage et là....
Un pauvre RENAULT 1000 kg, immatriculé dans en Seine-et-Oise en 1951 ! Comment a-t-il fini dans la montagne Corse ???
Ne désirant en aucun cas troubler leur sérénité, je décide de me retirer sur la pointe des pieds et de rendre ces 2 compères au contexte qui les enveloppe peu à peu...
Voilà, l'heure est venue pour moi de quitter cet endroit magique, et de le laisser retrouver sa quiétude.
Je me recueille un instant devant cette pauvre 204 lapidée à coups de rochers lors de quelque Intifada locale, sans doute..........
...et, alors que le soir entoure peu à peu les habitants d'une ambiance vespérale..
...je me retire sur la pointe des pieds, en rendant à dame nature les droits qui sont les siens...
Direction une autre carrière abandonnée, très éloignée de la précédente et qui a cessé son activité à la fin du XXème siècle.
Elle n'abrite que peu de véhicules mais la promenade valait quand même le coup.
C'est à bord de ma "chasse-mobile" de sport que je me présente à l'entrée, un beau jour de juin 2014... Je comprends vite qu'il va me falloir grimper à pieds... Bien fait pour moi, la prochaine fois, je prendrai un 4x4...
C'est donc parti pour 15 minutes d'ascension d'une piste caillouteuse...et pentue !
Après l'effort, je peux au moins admirer le panorama. La chasse-mobile n'est déjà plus qu'un grain de sable au lointain et je continue à monter, jusqu'à un plateau où surgissent 2 baraques abandonnées.
Un terre-plein sur la droite va dévoiler un premier véhicule, ingéré par les ronces... Je décide de m'approcher quand même...
Ce 4x4, qui présente quelques ressemblances avec un Land Rover, est en réalité une peu courante FIAT Nuova Campagnola, lancée fin 1973...
Le chemin s'enfonce dans le maquis et la végétation devient plus dense. Heureusement, quelques habitantes m'ouvrent la voie....
Au détour d'un virage, j'aperçois le bout du tunnel : la plate-forme de la carrière, où git une pelle mécanique paraissant s'être arrêtée en plein travail, comme foudroyée....
Encore quelques efforts et j'arrive sur place. 2 camions s'abritent dans les épineux.
Si le premier est un traditionnel BERLIET GLC8, l'autre est un plus rare MAN 650 Diesel, ré-immatriculé en 1988.
Bien que n'étant pas passionné par les engins de TP, je m'approche quand même de cette FIAT-ALLIS, que le contexte permet de mettre en valeur...
....et après une vue d'ensemble, je "referme la porte" et je laisse ces véhicules reposer en paix.
Le site suivant est à l'arrêt depuis la fin des années 70. La ville avance et il est à craindre que son avenir soit lié au développement des programmes immobiliers qui peu à peu terrassent les derniers vestiges du passé industriel ou tout simplement historique de la Corse... De la modeste place qui est la mienne, me restera la satisfaction de dire "j'ai connu..."
A l'heure où je découvre cet endroit, la nature a repris ses droits et la végétation est luxuriante.
6 véhicules y habitent dont 2 au moins seraient plus à leur place dans les lacets d'un col de montagne que dans une carrière... J'ai pris pas mal de photos du décor, tant que rien ne bouge et parce que les figuiers de Barbarie pullulent, certains dévorant les voitures...
... d'autres laissant notre imagination vagabonder, entre un soldat au garde à vous...
...un lapin Duracell...
...ou un autre géant surveillant l'horizon.... Ici, comme sur toutes les îles, le danger est toujours venu de la mer...
Mais revenons à nos moutons (Italiens), avec cette pauvre FIAT 1300 bientôt invisible. Elle a conservé son 45 BP 20, daté de 1965 !
C'est un bon début ! Poursuivant mon chemin au milieu de cette végétation urticante...
...je parviens à la hauteur d'un deuxième véhicule, sagement garé sur le côté... Les figuiers semblent avoit déteint sur lui...
Toutefois, si la forme générale de l'engin me fait penser immédiatement à une SIMCA 1000, je remarque le capot (jadis) noir mat et la caisse"vert acide" spécifique aux Rallye 2. Mais que fait cette petite sportive ici ? Mystère....
Je quitte cette SIMCACTUS...
... et je reprends l'ascension vers les ruines. Le temps passe et je voudrais terminer avant la nuit...
Chemin faisant, je tombe sur Ramsès aux aguets.... Y aurait-il un Feu Vert dans le secteur ?
Après 10 minutes, je parviens à la hauteur d'un bâtiment ouvert, divisé en 2 locaux.
A gauche, ce qui ressemble à une remise.. Au milieu de pièces diverses, je note la présence de 2 portes de Dauphine... Intéressant....
La partie droite abrite divers matériels jadis nécessaires au fonctionnement de la carrière...
Contournant le local, je parviens sur un terrain plus dégagé... Un panorama sympathique s'offre alors à moi....
2 RENAULT 1000kg ! Ou plutôt 1,5..... car l'un a moins bien vieilli que l'autre....
C'est en me faufilant à l'avant du fourgon le plus intègre que je note la présence d'un 3ème véhicule, posé devant...
Une NSU 1200 TT ! Décidément, cette carrière abrite des choses bien sympathiques ! Mais la présence de cette petite sportive, tout comme celle de la Rallye 2 me laisse pantois....
Une ultime série de clichés et je quitte cette "Nenesse"...
...car l'ascension n'est pas terminée....
et la progression est lente...
Le sentier rétrécit... Seuls les sangliers semblent l'emprunter désormais... Les sangliers et le chasseur d'épaves....
Au terme d'un dernier effort, je parviens au sommet, au coeur de la carrière... Un morceau de tôle ondulée aperçu de loin me fait penser à un CITROEN HY mais ce n'est qu'un cabanon...
J'entreprends alors d'explorer cette esplanade dans les détails et bien m'en prend, puisqu'en grimpant sur un talus, j'aperçois cette RENAULT Dauphine bleue bien amochée... Les portes avant qui ornent le local en contrebas sont certainement les siennes !
Le calme de l'endroit m'inciterait presque à demeurer sur place....Mais le temps passe, le jour décline lentement et, après une ultime photo, je me résouds à rejoindre le tumullte urbain....